
Une cérémonie mémorable dans le cadre majestueux du grand auditorium de la Sorbonne. Huit récipiendaires, incarnant l’excellence dans leur domaine et mis à l’honneur lors de cette cérémonie, parés de leurs habits sont entrés au sons de la musique sous la plus célèbre toile marouflée de la Sorbonne (25,60 m x 4,50 m), Le Bois Sacré de Puvis de Chavannes, évoquant les symboles vivants des Lettres, des Sciences et des Arts assemblés autour de la Sorbonne.
« La littérature est un domaine dans lequel se combinent les connaissances, les intuitions, les émotions et le besoin d’ordonner intellectuellement le monde. »
Écrivaine polonaise et lauréate du prix Nobel de littérature en 2018, Olga Tokarczuk explore dans ses œuvres des thèmes qui lui sont chers : le mystère, le mythe et le voyage. Son roman Les livres de Jakob est considéré comme son chef-d’œuvre et a reçu un grand succès critique et public.
Qu’est-ce qui vous a inspiré à explorer le réalisme magique dans votre travail ?
Olga Tokarczuk : C’est discutable. Je ne saurai pas dire si mes livres tombent dans cette catégorie très simpliste de « réalisme magique ». Pour moi, il s’agit d’un terme historique décrivant la littérature ibéro-américaine de la seconde moitié du XXe siècle. Il m’arrive souvent de dépasser les frontières du roman réaliste, car je crois qu’il est impossible de représenter le monde uniquement avec des outils réalistes. Nous voyons le monde subjectivement et émotionnellement, nous sommes sensibles aux illusions. En plus nous sommes influencés par les mythes, les contes de fées et pardes représentations tout à fait contemporaines issues notamment du cinéma. Nous vivons également des situations que nous n’aurions jamais cru possibles jusqu’à ce qu’elles se produisent.
Comment votre formation en psychologie influence-t-elle votre écriture ?
O.T. : Les lectures psychologiques et le travail avec les patients ont dû jouer un rôle. Mais est-ce que cela a influencé réellement ma façon d’écrire, je n’en ai aucune idée. Je ne sais pas comment j’écrirais si j’avais étudié, par exemple, la construction des ponts. Je pense qu’étudier nous donne un sentiment général de confiance intellectuelle, peu importe ce que nous étudions. Cependant, l’écriture reste un énorme effort d’auto-éducation, le dénominateur commun de la curiosité pour le monde en général, le courage de s’exprimer à sa manière et la détension d’un certain savoir pas toujours évident.
Que représente pour vous ce doctorat honoris causa de Sorbonne Université ? Comment considérez-vous cette distinction dans la perspective plus large de votre carrière ?
O.T. : J’en suis très heureuse. Ce titre académique est décerné par une prestigieuse université. J’ai un grand respect pour le travail universitaire et pour le milieu académique en général. Une telle distinction prouve que mes livres sont pris au sérieux en tant que voix artistique permettant de comprendre la réalité qui nous entoure.
Sorbonne Université favorise la recherche interdisciplinaire dans les domaines de la littérature, de l’histoire et des sciences sociales. Comment voyez-vous votre travail, en particulier son engagement avec l’histoire, l’identité et l’écologie, entrer en résonance avec la mission intellectuelle de l’université, alors que vous recevez cette récompense ?
O.T. : Dans un sens, nous, les écrivaines et écrivains, faisons un travail de scientifique, même si ce n’est pas toujours en utilisant des méthodes strictement scientifiques. Je considère la recherche effectuée pour chaque livre comme un travail scientifique – il s’agit de collecter une énorme quantité de matériel, pour finalement l’abandonner et utiliser les données collectées pour créer une nature différente de l’histoire qui sera racontée. La littérature est un domaine dans lequel se combinent les connaissances, les intuitions, les émotions et le besoin d’ordonner intellectuellement le monde.
https://www.sorbonne-universite.fr/portraits/olga-tokarczuk
Docteurs Honoris Causa 2022-2025 : Huit personnalités étrangères honorées par Sorbonne Université dont les lauréats du Prix Nobel, de la médaille Fields, du Prix Leibniz, président du GIEC, l’Académie américaine des arts et des sciences
Dans le cadre de son engagement pour l’excellence académique et culturelle, Sorbonne Université décernera le 25 mars prochain, le titre de Docteur Honoris Causa à huit personnalités étrangères lors d’une cérémonie au Grand Amphithéâtre de la Sorbonne. Cette prestigieuse distinction, attribuée par les plus grandes universités du monde, honore leurs contributions remarquables aux arts, aux lettres, aux sciences et aux techniques, ainsi que leur impact significatif sur la France et l’université.
Chaque récipiendaire, à travers leurs parcours respectifs, incarne les valeurs de Sorbonne Université à savoir l’ouverture au monde, l’intégrité, l’universalisme, la diversité, la soutenabilité d’un point de vue environnemental et sociétal et la liberté d’opinion et d’expression.
À travers eux, Sorbonne Université met en lumière son identité, une université pluridisciplinaire ancrée dans la société, qui a pour mission de promouvoir la science et les humanités, libres et créatives, au service du bien commun et du progrès.
Face aux multiples menaces qui pèsent sur la science, la cérémonie des Docteurs Honoris Causa de Sorbonne Université rappelle que la culture et les sciences sont indispensables à la cohésion et à la compréhension partagée du monde, et que le respect des principes fondamentaux que sont la liberté académique, l’examen méthodique des faits, le débat pluraliste et la poursuite de la vérité comme horizon garantissent notre capacité collective à répondre aux grands enjeux contemporains.
Les récipiendaires, incarnant l’excellence dans leur domaine et mis à l’honneur lors de cette cérémonie, sont :
Giovanna MALLUCCI : chercheuse clinicienne en neurosciences, Giovanna Mallucci est directrice du centre de l’institut de recherche sur les maladies neurodégénératives à l’Université de Cambridge. Elle est reconnue internationalement pour ses travaux innovants sur la neuro-dégénérescence et a récemment développé un traitement pour les maladies de type Alzheimer, actuellement en phase d’essai clinique.
Jean-Jacques MUYEMBE : virologue de renommée mondiale, Jean-Jacques Muyembe a été co-découvreur du virus Ebola en 1976 et a consacré sa carrière à la lutte contre les épidémies. Directeur de l’Institut national de recherche biomédicale de Kinshasa depuis 1998, il a notamment co-inventé l’anticorps monoclonal « mAb114 » contre Ebola.
Chimamanda NGOZI ADICHIE : écrivaine nigériane renommée, Chimamanda Ngozi Adichie a conquis la scène littéraire internationale avec des romans tels que « L’Hibiscus pourpre » et « Americanah ». Elle est élue à l’Académie américaine des arts et des sciences en 2017.
Olivier PRIMAVESI : philologue de l’antiquité grecque, Oliver Primavesi occupe la chaire de professeur de philologie grecque à l’Université Louis-et-Maximilien de Munich. Spécialiste de la pensée d’Aristote, il a reçu de nombreuses distinctions, dont le Prix Leibniz en 2007.
Rémi QUIRION : chercheur en neurosciences et premier Scientifique en chef du Québec, Rémi Quirion a contribué à une meilleure compréhension de maladies telles que l’Alzheimer et la dépression. Auteur de plus de 750 publications, il est l’un des neuroscientifiques les plus cités au monde.
James Ferguson SKEA : climatologue écossais, James Skea est le président du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) depuis 2023. Ses travaux portent sur les questions d’énergie, de changements climatiques et d’innovation technologique.
Olga TOKARCZUK : écrivaine polonaise et lauréate du prix Nobel de littérature en 2018, Olga Tokarczuk explore dans ses œuvres des thèmes qui lui sont chers : le mystère, le mythe et le voyage. Son roman « Les livres de Jakob » est considéré comme son chef-d’œuvre et a reçu un grand succès critique et public.
Maryna VIAZOVSKA : mathématicienne ukrainienne, Maryna Viazovska a reçu la prestigieuse médaille Fields en 2022. Ses travaux sur les empilements de sphères ont été largement reconnus, la propulsant comme l’une des mathématiciennes les plus influentes de notre époque.
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